Dimanche 30 novembre 2014 : 1er dimanche de l'Avent

Publié le 1 Décembre 2014

Baptême de Roxanne

 

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De la transparence à la lumière

 

"Veillez"

 

Dimanche 30 novembre 2014 : 1er dimanche de l'Avent

Veiller. Premier mot de ce temps de l'Avent.

Veiller comme on veille toute une nuit à guetter l'aurore, le rayon de soleil, la pointe de lumière qui jaillit de l'ombre, à l'horizon.

Veiller comme on veille l'enfant qui dort, ou le silence de la nuit, le malade ou le vieillard, l'être aimé, le retour d'un ami, la bonne nouvelle ou la mauvaise.

Veiller, ou lutter. La veille est un combat. Contre le sommeil, contre la fatigue, contre le temps, contre l'impatience, contre la lassitude, contre la désespérance. Veiller, c'est espérer, malgré tout, envers tout. Le veilleur est un lutteur.

Je ne parle pas de ceux qui veillent en faisant la fête, en se laissant étourdir par les musiques à tue-tête ou les lumières criardes, par le néant des papiers glacés et les illusions médiatiques. Ceux-là ne veillent pas, et même s'ils traversent la nuit, le bruit et l'inconsistance les ont endormis. Aveuglés, ils ne voient pas l'important, ils passent à côté de l'essentiel. Ils se shootent et rêve d'un autre monde, d'un ailleurs, et perdent de vue la réalité. Avouons que nous sommes de ceux-là aussi, parfois, peut-être trop souvent. Aveuglés comme ceux dont parle Isaïe :

« Pourquoi, Seigneur, laisser nos cœurs s'endurcir ?

Nous nous sommes égarés... nous étions desséchés comme des feuilles. »

            L'Evangile nous appelle à veiller. Et donc à rester. A lutter. A être présent. A ne pas quitter le poste. Le veilleur ne dort pas. Il est tendu vers ce qui n'est pas encore là. Et les yeux fatiguent, et piquent, et deviennent rouge... jusqu'aux larmes, quand la veille se fait longue. Larmes de fatigue à force d'attendre, ou de joie devant la nouvelle, ou de tristesse...  Larmes qui lavent le regard. Et changent la vision. Elles embrument les yeux, mais gouttes transparentes, elles disent combien la personne entre tout entière en émotion, en résonance, en empathie. Avec l'enfant, avec le malade, avec le vieillard, avec l'être aimé, avec la situation particulière, avec l'injustice ou avec la justice enfin recouvrée. La larme dit que tout le corps et tout l'être vibrent. « Heureux ceux qui pleurent... » Entrée en transparence avec l'autre, celui qu'on attendait, ce qu'on n'attendait plus, ce pour quoi on luttait. Ce qui n'était qu'espérance, ce qui était toute espérance, et qui est là désormais. « Faire l'éloge des larmes, c'est faire l'éloge du corps, du corps que nous sommes, du corps en relation, qui touche, qui aime, qui sent et ressent, qui imagine et se souvient, qui fait confiance et qui espère. Faire l'éloge des larmes, c'est faire l'éloge des sens, et de ce sixième sens qu'est l'art d'être présent à la présence, d'être là, ici et maintenant, présent à la présence d'autrui, à la présence de Dieu. Faire l'éloge des larmes, c'est faire l'éloge de l'incarnation, de notre condition limité, finie, et de ce grand désir d'infini qui l'habite. C'est faire l'éloge de l'incarnation de Dieu qui choisit d'habiter la maison des hommes, leur maison de chair et de peau, toute fragile et mortelle, parce qu'il l'aime et la trouve belle. Faire l'éloge des larmes, c'est nous souvenir que le Dieu confessé par les chrétiens est un Dieu qui pleure, à cause des hommes, avec les hommes, pour les hommes. Faire l'éloge des larmes, c'est à la suite de notre Dieu et avec lui aimer ce temps, aimer ce monde, aimer notre condition de chair, de sang, de larmes et de joie. »[1] « Heureux ceux qui pleurent... », et malheureux les yeux secs, les yeux qui ne voient plus, qui ne sentent rien, qui ne vibrent pas, qui restent insensibles. Malheureux les yeux mécaniques comme ceux des caméras vidéo, qui analysent et décortiquent, mais ne voient pas, et ne savent pleurer. Malheureux les yeux secs et emportés par le sommeil.

            Là est le programme de notre temps d'avent. Veiller. Veiller sans retenue. Veiller sans se lasser. Veiller sans se décourager. Veiller. Veiller jusqu'aux yeux qui piquent et jusqu'aux larmes, pour qu'elles viennent faire leur travail : enlever toutes les couches superficielles de visions que nous avons, et enfin nous voir, et Le voir. Lui, Celui qui vient : la Lumière, le faisceau lumineux tant attendu dans l'horizon trop obscure de nos vies et du monde.

            Là est le programme de ta vie nouvelle, Roxanne. Devenir chrétienne, devenir sentinelle en ce monde. En ton monde, là où tu seras, entourée de tes proches et en Église, cette communauté chrétienne et universelle qui t'accueille ce matin comme l'une des siens. C'est à ça que t'engage le baptême que tes parents ont demandé pour toi, c'est à ça que t'engage le plongeon que tu vas vivre, et l'onction d'huile dont tu vas être marquée. N'est-ce pas de cela, de cette lutte pleine d'espérance, que tes contemporains ont besoin, qu'ils attendent parfois sans le savoir. Roxanne, devient baptisée, disciple, veilleur, éveilleur...

            Chemin d'avent, chemin de vie. Chemin qui s'ouvre à nous. Vie qui s'ouvre à Roxane et à nous. Comme une aventure, un challenge, un défi. Joyeux. Osé. Beau. Pas à pas, gagner en transparence pour découvrir La Lumière et l'accueillir. Et ne pas louper le rendez-vous, puis la rencontre, puis l'amitié, puis le voyage avec Lui qui se donne déjà à rencontrer, là, en ton frère, ta sœur, ton voisin...

            L'horizon de Noël pourra nous aveugler et nous détourner, si nous accordons trop de place aux néons, à la fête consumériste, et aux catalogues de bouffe et de jouets. L'horizon de Noël pourra nous intriguer et nous attirer, si nous distinguons dans le lointain clair-obscure se dessiner la venue d'un enfant changeant mystérieusement le cours du temps. Combien nous faudra-t-il de veille et de larmes, pour percevoir, dans le brouhaha des préparatifs, la douceur de cette lumière ?

            Le choix est là, à toi de le faire, ou à nous de le faire ensemble. « Aucun don de grâce ne nous manque, à vous qui attendez de voir se révéler notre Seigneur Jésus-Christ. C'est lui qui vous fera tenir fermement jusqu'au bout », disait l'apôtre Paul. Bonne Nouvelle : celui que nous cherchons est déjà là, avec nous, pour faire le chemin. Et nous guider à lui.

            Veillez ! Veillons ! A en devenir humain, vivants et en alerte. L'endormis loupe le rendez-vous, le veilleur pleure de la rencontre enfin advenue. Un temps d'Avent pour préparer nos cœurs et nos corps à l'événement espéré. Un temps d'Avent pour vivre déjà de tout notre cœur et de tout notre corps la rencontre inouïe d'un Dieu qui se fait homme.

            Amen

P. Benoît Lecomte

 

[1]    Anne Lécu, in Cinq éloges de l'épreuve, Albin Michel, 2014, p77

Livre d'Isaïe 63,16b-17.19b.64,2b-7.
Tu es, Seigneur, notre Père, notre Rédempteur : tel est ton nom depuis toujours.
Pourquoi Seigneur, nous laisses-tu errer hors de ton chemin, pourquoi rends-tu nos cœurs insensibles à ta crainte ? Reviens, pour l'amour de tes serviteurs et des tribus qui t'appartiennent.
Ah ! Si tu déchirais les cieux, si tu descendais, les montagnes fondraient devant toi.
Voici que tu es descendu, et les montagnes ont fondu devant ta face.
Jamais on ne l'a entendu ni appris, personne n'a vu un autre dieu que toi agir ainsi envers l'homme qui espère en lui.
Tu viens à la rencontre de celui qui pratique la justice avec joie et qui se souvient de toi en suivant ton chemin. Tu étais irrité par notre obstination dans le péché, et pourtant nous serons sauvés.
Nous étions tous semblables à des hommes souillés, et toutes nos belles actions étaient comme des vêtements salis. Nous étions tous desséchés comme des feuilles, et nos crimes, comme le vent, nous emportaient.
Personne n'invoquait ton nom, nul ne se réveillait pour recourir à toi. Car tu nous avais caché ton visage, tu nous avais laissés au pouvoir de nos péchés.
Pourtant, Seigneur, tu es notre Père. Nous sommes l'argile, et tu es le potier : nous sommes tous l'ouvrage de tes mains.

 

Psaume 80(79),2-3bc.15-16a.18-19.
Berger d'Israël, écoute,
toi qui conduis ton troupeau, resplendis !
Réveille ta vaillance
et viens nous sauver.

Dieu de l'univers reviens !
Du haut des cieux, regarde et vois :
visite cette vigne, protège-la,
celle qu'a plantée ta main puissante.

Que ta main soutienne ton protégé,
le fils de l'homme qui te doit sa force.
Jamais plus nous n'irons loin de toi :
fais-nous vivre et invoquer ton nom !

 

Première lettre de saint Paul Apôtre aux Corinthiens 1,3-9.
Frères, que la grâce et la paix soient avec vous, de la part de Dieu notre Père et de Jésus Christ le Seigneur.
Je ne cesse de rendre grâce à Dieu à votre sujet, pour la grâce qu'il vous a donnée dans le Christ Jésus ;
en lui vous avez reçu toutes les richesses, toutes celles de la Parole et toutes celles de la connaissance de Dieu.
Car le témoignage rendu au Christ s'est implanté solidement parmi vous.
Ainsi, aucun don spirituel ne vous manque, à vous qui attendez de voir se révéler notre Seigneur Jésus Christ.
C'est lui qui vous fera tenir solidement jusqu'au bout, et vous serez sans reproche au jour de notre Seigneur Jésus Christ.
Car Dieu est fidèle, lui qui vous a appelés à vivre en communion avec son Fils, Jésus Christ notre Seigneur.

 

Évangile de Jésus Christ selon saint Marc 13,33-37.
Jésus parlait à ses disciples de sa venue : « Prenez garde, veillez : car vous ne savez pas quand viendra le moment.
Il en est comme d'un homme parti en voyage : en quittant sa maison, il a donné tout pouvoir à ses serviteurs, fixé à chacun son travail, et recommandé au portier de veiller.
Veillez donc, car vous ne savez pas quand le maître de la maison reviendra, le soir ou à minuit, au chant du coq ou le matin.
Il peut arriver à l'improviste et vous trouver endormis.
Ce que je vous dis là, je le dis à tous : Veillez ! »

Rédigé par Paroisse saint Jean Baptiste

Publié dans #Homélies

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