Samedi 28 avril 4ème dimanche de Pâques B

Publié le 28 Avril 2012

  • Homélie du P. Benoit Lecomte

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        Cette page d'évangile n'est jamais simple d'accès. Elle a beau revêtir un caractère champêtre plutôt agréable, on a tôt fait de coincer à sa lecture : si l'on veut bien que Jésus soit le bon berger, avouons que nous avons du mal à être comparé à un troupeau de brebis. Notre désir d'indépendance et d'autonomie, de responsabilité et d'initiative s'en trouve brimé, et j'imagine d'emblée l'accueil qui serait réservé au pasteur qui prendrait ses paroissiens pour un troupeau de brebis...

        Pourtant, c'est cette expression de l'Evangile qui m'a arrêté à sa méditation : « Il y aura un seul troupeau et un seul pasteur ». Car n'oublions pas que nous sommes toujours dans le temps pascal. Nous continuons de fêter la résurrection du Seigneur Jésus, et l'écho de la nuit de Pâques est encore dans nos oreilles et dans nos cœurs. Ainsi, ne serait-ce pas encore un aspect de cette résurrection qui nous serait proposé aujourd'hui ? « Moi, dit Jésus, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent, comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis. J'ai encore d'autres brebis, qui ne sont pas dans cette bergerie : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur ».

        J’entends là une conséquence directe de la résurrection du Christ. Cette résurrection est œuvre de réconciliation de toute l'humanité. A cause de la vie de Jésus donnée jusqu'au bout pour tous, et de sa résurrection pour tous, le Christ vient nouer une fraternité universelle qui sonne le glas de toutes les divisions. C'est ce que dira saint Paul dans sa lettre aux Ephésiens, à propos des Juifs et des païens : « C'est lui qui est notre paix, lui qui des deux peuples n'en a fait qu'un, détruisant la barrière qui les séparait... pour, en sa personne, les réconcilier avec Dieu tous deux en un seul corps, par la croix : en sa personne il a tué la haine » (Eph 2, 14-16). Ou encore, aux Galates : « Vous tous, baptisés dans le Christ, vous avez revêtu le Christ : il n'y a ni Juif ni Grec, ni esclave ni homme libre, ni homme ni femme, car tous vous ne faites qu'un dans le Christ Jésus » (Ga 3, 27-28). Ou encore aux Colossiens : « Par lui, Dieu a réconcilié tous les êtres pour lui, sur la terre et dans les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix » (Co 1, 20).

        La résurrection de Jésus vient transformer l'intérieur de nos vies... mais aussi toute leur dimension sociale et relationnelle. En Jésus ressuscité, une communion nouvelle est manifestée. Communion entre Dieu et les hommes, les hommes devenant pleinement participants de la vie divine. Et communion des hommes entre eux, définitivement réconciliés en Jésus Christ. En ressuscitant d'entre les morts, Jésus abolie toutes les divisions et crée un seul peuple, une seule humanité, une seule communauté humaine appelée à une vocation unique. Une vocation qui faisait déjà partie de la prière de Jésus à son Père, avant de mourir : «Que tous soient un, Père, comme tu es en moi et moi en toi, qu'eux aussi soient en nous » (Jn 17, 21).

        Alors que le communautarisme et le sectarisme, dans notre monde et même parfois dans l’Église, risquent toujours de prendre de l'ampleur, Jésus ressuscité rappelle qu'une seule communauté n'a d'importance à ses yeux : celle du genre humain. A l'heure où les discours les plus extravagants font monter la peur des uns contre les autres, la fête de Pâques nous apprend à passer de la peur à la confiance. Et la résurrection de Jésus nous apprend à entrer et à vivre dans cette confiance, nécessaire à la paix entre les peuples comme à la paix en nos cœurs.

        C'est bien le nom de Jésus, Jésus mort et ressuscité, Jésus vainqueur de la haine et du mal, qui vient nous sauver et réconcilier le monde. C'est bien le nom de Jésus qui vient relever l'homme perdu. Comme dans ce récit des Actes des apôtres, où Pierre a relevé un mendiant infirme de naissance simplement en lui disant : «  De l'or et de l'argent, je n'en ai pas, mais ce que j'ai, je te le donne : au nom de Jésus Christ, le Nazaréen, marche ! » (Ac 4) C'est ce Nom accueilli et proclamé depuis lors sur toute la terre, qui vient donner la paix et la réconciliation aux hommes, personnellement et communautairement. Belle histoire que celle des Actes des apôtres, mais qui nous rappelle à notre devoir et à notre responsabilité. Par l'attention aux plus petits, aux plus fragiles, aux rejetés, aux oubliés, l’Église veut être sacrement du Nom de Jésus, l'écho et la manifestation de ce Nom donné aux hommes. Et cela nous engage, car il ne s'agit plus seulement aujourd'hui de faire des œuvres de charité ou des actions humanitaires, mais nous comprenons que nous sommes rendu au point d'être obligés de rendre justice à chacun. Ce n'est pas l'aumône qui sera artisan de réconciliation, mais la justice, le droit et la lutte pour le respect de la dignité de chacun, hommes et peuples.

        « Le Verbe de Dieu, par qui tout a été fait, dit le concile Vatican II, s'est Lui-même fait chair, afin que, homme parfait, Il sauve tous les hommes et récapitule toutes choses en Lui. Le Seigneur est le terme de l'histoire humaine, le point vers lequel convergent les désirs de l'histoire et de la civilisation, le centre du genre humain, la joie de tous les cœurs et la plénitude de leurs aspirations. C'est Lui que le Père a ressuscité d'entre les morts, a exalté et a fait siéger à sa droite [...] Vivifiés et rassemblés en son Esprit, nous marchons vers la consommation de l'histoire humaine qui correspond pleinement à son dessein d'amour: " ramener toutes choses sous un seul chef, le Christ, celles qui sont dans les cieux et celles qui sont sur la terre " (Eph. 1, 10). » (Gaudium et Spes 45) 

 

        Le bon berger conduit toutes les brebis de la terre, de toutes les bergeries, de tous les lieux, de toutes les cultures, de toutes les conditions, de toutes les religions pour en faire, mystérieusement mais réellement, un seul troupeau. La Pâques de Jésus, sa mort et sa résurrection pour tous, nous oblige bien à une fraternité sans limite, pour que ce que nous sommes tous, à savoir enfants de Dieu, paraisse enfin clairement, comme nous y appelle Saint Jean. Et que, dans l'amour dont le Fils nous a comblé, nous soyons enfin semblables à lui en le voyant tel qu'il est (1 Jn 3, 1-2).

Amen.

P. Benoît Lecomte

  • Textes du jour

Livre des Actes des Apôtres 4,8-12.
Convoqué devant le grand conseil d’Israël, Pierre, rempli de l’Esprit Saint, déclara : « Chefs du peuple et anciens,
nous sommes interrogés aujourd'hui pour avoir fait du bien à un infirme, et l'on nous demande comment cet homme a été sauvé.
Sachez-le donc, vous tous, ainsi que tout le peuple d'lsraël : c'est grâce au nom de Jésus le Nazaréen, crucifié par vous, ressuscité par Dieu, c'est grâce à lui que cet homme se trouve là devant vous, guéri.
Ce Jésus, il est la pierre que vous aviez rejetée, vous les bâtisseurs, et il est devenu la pierre d'angle.
En dehors de lui, il n'y a pas de salut. Et son Nom, donné aux hommes, est le seul qui puisse nous sauver. »

Psaume 118(117),1.4.8-9.22-23.28-29.
Rendez grâce au Seigneur : Il est bon !
Éternel est son amour !
Qu'ils le disent, ceux qui craignent le Seigneur :
Éternel est son amour !

Mieux vaut s'appuyer sur le Seigneur
que de compter sur les hommes ;
mieux vaut s'appuyer sur le Seigneur
que de compter sur les puissants !

La pierre qu'ont rejetée les bâtisseurs
est devenue la pierre d'angle :
c'est là l'œuvre du Seigneur,
la merveille devant nos yeux.

Tu es mon Dieu, je te rends grâce,
mon Dieu, je t'exalte !
Rendez grâce au Seigneur : Il est bon !
Éternel est son amour !

Première lettre de saint Jean 3,1-2.
Mes bien-aimés, voyez comme il est grand, l'amour dont le Père nous a comblés : il a voulu que nous soyons appelés enfants de Dieu - et nous le sommes. Voilà pourquoi le monde ne peut pas nous connaître : puisqu'il n'a pas découvert Dieu.
Bien-aimés, dès maintenant, nous sommes enfants de Dieu, mais ce que nous serons ne paraît pas encore clairement. Nous le savons : lorsque le Fils de Dieu paraîtra, nous serons semblables à lui parce que nous le verrons tel qu'il est.

Évangile de Jésus-Christ selon saint Jean 10,11-18.
Jésus disait aux Juifs : « Je suis le bon pasteur, le vrai berger. Le vrai berger donne sa vie pour ses brebis.
Le berger mercenaire, lui, n'est pas le pasteur, car les brebis ne lui appartiennent pas : s'il voit venir le loup, il abandonne les brebis et s'enfuit ; le loup s'en empare et les disperse.
Ce berger n'est qu'un mercenaire, et les brebis ne comptent pas vraiment pour lui.
Moi, je suis le bon pasteur ; je connais mes brebis, et mes brebis me connaissent,
comme le Père me connaît, et que je connais le Père ; et je donne ma vie pour mes brebis.
J'ai encore d'autres brebis, qui ne sont pas de cette bergerie : celles-là aussi, il faut que je les conduise. Elles écouteront ma voix : il y aura un seul troupeau et un seul pasteur.
Le Père m'aime parce que je donne ma vie pour la reprendre ensuite.
Personne n'a pu me l'enlever : je la donne de moi-même. J'ai le pouvoir de la donner, et le pouvoir de la reprendre : voilà le commandement que j'ai reçu de mon Père. »

Rédigé par Paroisse Saint Jean Baptiste Angouleme

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