Samedi 4 février 2012 : 5ème dimanche du TO B
Publié le 4 Février 2012
- Homélie du P. Benoit Lecomte
Nos emplois du temps sont souvent bien pleins, et nous courrons d’un rendez-vous à l’autre… Au cours de sa journée, Jésus paraît lui aussi bien occupé. Il guérit des malades, chasse des démons, vit une foule de rencontres. Il agit au milieu des « anonymes », comme disent les médias d’aujourd’hui. Mais au milieu de ces « anonymes », l’évangéliste zoome sur une femme : la belle-mère de Simon. Cette femme est malade. va s’approcher et la fièvre partie la femme va les servir. Cette scène se déroule dans la maison de Simon, celui qui deviendra Pierre. Dans cette maison de Simon-Pierre, figure de l’Eglise, cette femme devient figure de l’humanité relevée (ressuscitée) par Jésus. Une humanité renouvelée qui se met au service du Christ et des hommes.
On comprend alors que cette page d’évangile est un sommaire, un résumé de la vie de Jésus que l’évangéliste Marc condense en une journée : du soir au matin et du matin au soir. Un résumé de l’activité de Jésus dans sa diversité, et dans sa profondeur et sa densité.
Dans sa diversité : il parcourt les synagogues pour proclamer la Parole de Dieu, il sert les hommes et les femmes qu’il croise dans leur faiblesse, guérissant les uns, libérant les autres, et il s’en va à l’écart, seul, pour prier son Père dans le silence.
Dans sa profondeur et sa densité : Jésus le Christ vient rejoindre l’homme dans ses blessures pour le prendre par la main et le relever, le ressusciter, et pour que l’homme vive.
A la suite de Jésus, nous sommes invités à prendre notre place, en Eglise, pour proclamer la Parole, servir les hommes dans leur fragilité, et vivre de la prière, retrouvant là les trois dimensions du baptême que nous avons reçu, parfois il y a longtemps, et que nous avons toujours à redécouvrir de façon nouvelle.
Dans l’Eglise, « les charismes sont divers », dira saint Paul. Et des baptisés, hommes et femmes, veulent déployer leur baptême de façon particulière en choisissant de consacrer leur vie au Christ, au service des hommes et à « l’annonce de l’Evangile », dit encore saint Paul. Les religieux et les religieuses sont, dans nos communautés, comme des aiguillons qui nous rappellent que nous avons été baptisés, consacrés au Christ, et que toute notre vie est appelée à tendre vers la personne de Jésus. Ils ne sont pas meilleurs que les autres. Mais pétris d’humanité, ils veulent, comme dit l’apôtre, se faire « tout à tous » et partager « les faiblesses des plus faibles » non seulement pour révéler à tout homme la richesse et la grandeur de la vie, mais encore pour rappeler à tous ce à quoi notre baptême nous engage.
Bernadette, Michelle, Marie-Françoise, vous êtes dans notre communauté paroissiale, ces aiguillons. Avec vos caractères, vos talents, vos limites, votre expérience, votre histoire, le charisme de votre congrégation. Et aussi avec l’engagement que vous avez pris, il y a déjà quelques temps, et que vous allez renouveler au milieu de nous tout à l’heure.
L’engagement à vivre la pauvreté, comme le Christ qui se fait pauvre parmi les pauvres, s’abaissant jusqu’à la mort. Lui qui était Dieu se laisse approcher par les malades, les exclus, les rejetés, et il les accueille et les relève. « Par la pauvreté, on devient participant de la pauvreté du Christ qui s’est fait indigent à cause de nous, alors qu’il était riche, afin de nous enrichir par son dépouillement ». (Vatican II, Perfectae Caritatis 13)
L’engagement à la chasteté, qui n’est pas une histoire de fesses, comme on le croit souvent, mais une histoire de regard qui n’enferme pas et de cœur qui se dilate. Elle est ouverture du cœur à tout homme et à toute femme, elle est disponibilité à l’amour de Dieu pour chacun de nous. Elle participe de cette liberté du Christ qui choisit chacun pour l’aimer de façon unique.
L’engagement à l’obéissance. Comme Jésus, dans l’évangile, se retire à l’écart pour prier Dieu et s’en remettre à la volonté de son Père, l’obéissance que vous vivez est obéissance à la volonté de Dieu, sous la motion de l’Esprit Saint. L’obéissance qui ne rabaisse pas, mais qui au contraire rend libre et fait grandir l’homme qui écoute la Parole de Dieu de tout son cœur et dans toute sa vie. L’obéissance comprise comme une écoute bienveillante de la Parole de celui qui veut notre bonheur.
Bernadette, Michelle, Marie-Françoise, je sais que vous n’êtes pas fan de ce genre d’exercice : vous préférez vivre votre apostolat dans l’anonymat des jours. Mais aujourd’hui, renouvelez ces engagements pour vous-mêmes. Pour replonger à la source de l’appel et de votre réponse, comme pour retrouver la joie des commencements. Nous sommes, parfois, comme Job, fatigués par la route, découragés par le chemin, essoufflés dans la mission. Au milieu de cette eucharistie, réentendez le Christ vous appeler, chacune par votre prénom et ensemble en communauté à faire résonner l’évangile par toute votre vie, jusque dans son quotidien le plus humble et caché.
Et renouvelez ces engagements pour nous. Pour réveiller en nous ce que nous avons reçu au jour de notre baptême. Pour retrouver nous aussi la fraicheur de l’évangile et la joie du service du Christ et de l’homme dans le service et la prière, par la pauvreté, la chasteté et l’obéissance. Je cite le concile Vatican II : « La profession des conseils évangéliques (pauvreté, chasteté, obéissance) apparaît comme un signe qui peut et doit exercer une influence efficace sur tous les membres de l’Eglise dans l’accomplissement courageux des devoirs de la vocation chrétienne. » (LG 44). Merci d’être cet humble signe au milieu de nous.
Comme dit Paul, nous n’avons pas à tirer orgueil de l’annonce de l’évangile. Elle est une nécessité qui s’impose à nous, par amour du Fils, en réponse à l’appel du Père, dans la confiance, la simplicité et la gratuité de l’Esprit. Enracinés par la prière dans l’intimité du Fils, source de toute activité apostolique, et renouvelant notre consécration à tous, par notre promesse baptismale et vos vœux religieux, que Dieu lui-même nous apprenne chaque jour à recevoir et à construire, au milieu de notre monde, ce que le Concile a donné pour titre à son décret sur la vie religieuse : la « Perfectae Caritatis », la charité parfaite.
Amen
P. Benoît Lecomte