Jeudi 9 mai 2013 : Fête de l'Ascension

Publié le 9 Mai 2013

Jeudi 9 mai 2013 : Fête de l'Ascension

Une fresque et un bouquet pour évoquer l'Ascension.

L'ascension : un effacement pour une présence. cet effacement est traduit par le profil perdu du Christ.

Mais il reste doublement présent :

  • le front appuyé contre notre humanité, loin de nous quitter il nous garde contre lui.
  • et grâce à son bras démesuré, il nous tient fermement dans ses mains.

La couleur ocre-rouge indique qu'il reste pleinement l'un de nous.

Les couleurs claires rejoignent celles du bouquet pour dire la joie du Ressuscité qui s'élève et notre propre joie dans la foi à sa suite.

Jeudi 9 mai 2013 : Fête de l'Ascension

Homélie du P. Benoit Lecomte

En christianisme, tout est question de corps, et rien ne fait plus problème que le corps. Quand Dieu prend corps en son Fils Jésus et que nous fêtons Noël, l'émerveillement nous saisi et nous pressentons que cet événement nous rejoint intérieurement. Quand le corps de ce bébé devenu adulte est crucifié, l'émerveillement devient scandale, scandale de la croix. Quand au matin de Pâques la corps a disparu du tombeau où il devait reposer, le mystère s’épaissit et l'étonnement grandit. D'autant que ce corps ne cesse ensuite d'apparaître et de disparaître pendant 40 jours, jusqu'à sa disparition définitive. Comme un enlèvement (« il a été enlevé du milieu de vous » disent les hommes en blanc ), comme une séparation (« il se sépara d'eux », Lc), comme un abandon de Celui qui désormais ne se montrera plus.

Le corps : vaste question qui traverse les siècles, bouleverse quotidiennement notre humanité, et dont la religion chrétienne a fait un enjeu, pour le meilleur et pour le pire. A ceux qui recherchent un corps parfait à coup de crèmes, de régimes ou d'exercices physiques en tous genres, répondent ceux qui nient l'importance du corps jusqu'à en avoir peur et à le rejeter. Corps chosifié, corps instrumentalisé, corps caché ou corps surexposé, corps marchandisé, corps malade et corps blessé, asexué ou hypersexualisé... d'un extrême à l'autre (et en évitant j'espère les extrêmes) nous avons tous un rapport particulier au corps (au notre et à celui des autres).

L'Evangile aussi prend position, à cause du Dieu qui a pris corps. Il nous dit la beauté et la grandeur du corps, du corps fait pour glorifier Dieu. Au corps-écran et au corps-absent, l'Evangile s'oppose et propose de découvrir le corps-passage. Le corps comme une porte (la Parole faite chair, Christ, n'a-t-il pas dit être « La Porte »?). Une porte pour mettre en relation deux pièces – ou deux mondes : l'homme et Dieu. « Ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint-Esprit qui est en vous ? », dira saint Paul dans sa lettre aux Corinthiens (1 Cor. 6, 19).

Le Corps de Jésus s'efface. Il ne se donnera plus à voir. Corps humain, il disparaît mais continue sa mission de médiateur : c'est notre chair qu'il mène au cœur de Dieu, notre corps qu'il glorifie. Corps ressuscité, il nous emmène avec lui auprès du Père. « Il est entré dans le ciel même, afin de se tenir maintenant pour nous devant la face de Dieu », disait la lettre aux Hébreux. Le corps humain a désormais sa place dans la demeure du Père, et tout corps est accueilli dans la vérité de la vie divine. Ton corps n'est pas fait pour toi, il est fait pour Dieu, pour découvrir ta relation à Dieu et pour en vivre toujours davantage. Cela, le Christ de l'Ascension te le fait découvrir avec une force renouvelée.

Mais l'effacement de ce corps n'annonce que l'apparition d'un autre corps : l’Église. Corps ecclésial, c'est à Elle de devenir désormais, dans l'Esprit Saint promis et reçu, la porte du passage de notre humanité à la vie de Dieu. Ce Corps, c'est nous. Dans le corps à corps humain que nous formons, se dessine le Corps d'un Dieu qui a pris chair pour mener nos corps en son corps. Un Corps-Eglise dont chacun doit prendre soin, tant du corps tout entier que de chacun de ses membres.

Il est heureux que le rassemblement Diaconia se déroule ces jours-ci à Lourdes. Sommet de notre année de la fraternité et du service du frère, les 10 à 12000 délégués de tous les diocèses, mouvements et service de l’Église de France se retrouvent pendant trois jours pour prier, réfléchir, partager idées et initiatives, et se rappeler, pour nous rappeler ensuite, que chaque homme est porteur du visage du Christ, que chaque membre est créé à l'image de Dieu et que chaque corps est porteur d'une dignité qui le dépasse. Ce rassemblement veut nous dire combien l’Église ne peut plus être l’Église, combien le Corps est blessé et amputé, quand nous manquent tous ceux que nous avons rejetés, classés, triés, étiquetés, rangés. Et combien le Corps ne peut être vraiment Corps que quand tous, absolument tous, sont accueillis, respectés, attendus, et que chaque membre prend sa place. Là est le Corps qui prend chair, à nouveau. Corps du Christ, il n'est plus corps humain donné pour un temps en un lieu précis (la Palestine d'il y a 2000 ans), mais devient Corps Communion nourri de l'eucharistie. L'Eglise comme nouveau corps-porte, corps-passage menant l'humanité dans son ascension vers Dieu.

Une ascension qui nous empêche, alors, de regarder en l'air et en arrière. Les deux hommes vêtus de blanc ont raison : « Ne restez pas à regardez le ciel. A regretter le temps passé, quand Jésus était parmi vous, le bon temps passé, quand tout semblait mieux, avant. A rêver à un temps révolu... Regardez devant vous, à hauteur d'homme! C'est là qu'est le corps que vous cherchez ! Avec tous ceux que vous allez croiser et que l'Esprit va vous donner de rencontrer », nous disent-ils. Les disciples présents lors de l'ascension de Jésus auraient pu pleurer ce qu'ils quittaient : le réconfort et la certitude d'une présence, la chaleur d'un corps. Ils se mettent au contraire à regarder autour d'eux pour faire grandir ce nouveau Corps, dans le souffle de l'Esprit qui mène sur les chemins de l'inconnu et de l'imprévisible. A regarder, à contempler et à servir l'homme – et en premier celui qui est considéré comme le dernier-, à louer Dieu pour ses merveilles et à le recevoir en nourriture pour que le Corps vive. C'est là la seule raison de l'Eglise : être ce Corps qui offre aux hommes le Corps du Christ – dans ses sacrements, dans son pardon, dans ses soins du corps et la douce radicalité de son regard et de ses paroles-, du Christ qui ne nous a pas abandonné dans son ascension, mais nous a fait devenir ce que nous sommes appelés à être.

Comme toutes nos approches du corps, l’Église pourra être, par nous ou par d'autres, chosifiée, magnifiée, instrumentalisée... Que nous puissions vivre en Église non pas en un corps crispé et apeuré ou attristé, mais comme en un corps fait pour glorifier ce Dieu qui se laisse glorifier par le corps de l'homme. L'Eglise, Corps fragile, vase d'argile, figure d'humanité que l'Esprit emporte avec le Christ dans l'Ascension du Fils. Ce Corps ne nous appartient pas non plus, il est le lieu de notre relation à Dieu et de la relation de tous les hommes entre eux. Lieu du service et de la fraternité la plus radicale, lieu de l'amour donné et reçu en vérité, lieu où Dieu prend à nouveau Corps pour que nos corps – toutes nos existences – soient à jamais unis en Lui.

Amen.

P. Benoît Lecomte

Textes du jour

Livre des Actes des Apôtres 1,1-11.

Mon cher Théophile, dans mon premier livre j'ai parlé de tout ce que Jésus a fait et enseigné depuis le commencement,
jusqu'au jour où il fut enlevé au ciel après avoir, dans l'Esprit Saint, donné ses instructions aux Apôtres qu'il avait choisis.
C'est à eux qu'il s'était montré vivant après sa Passion : il leur en avait donné bien des preuves, puisque, pendant quarante jours, il leur était apparu, et leur avait parlé du royaume de Dieu.
Au cours d'un repas qu'il prenait avec eux, il leur donna l'ordre de ne pas quitter Jérusalem, mais d'y attendre ce que le Père avait promis. Il leur disait : « C'est la promesse que vous avez entendue de ma bouche.
Jean a baptisé avec de l'eau ; mais vous, c'est dans l'Esprit Saint que vous serez baptisés d'ici quelques jours. »
Réunis autour de lui, les Apôtres lui demandaient : « Seigneur, est-ce maintenant que tu vas rétablir la royauté en Israël ? »
Jésus leur répondit : « Il ne vous appartient pas de connaître les délais et les dates que le Père a fixés dans sa liberté souveraine.
Mais vous allez recevoir une force, celle du Saint-Esprit, qui viendra sur vous. Alors vous serez mes témoins à Jérusalem, dans toute la Judée et la Samarie, et jusqu'aux extrémités de la terre. »
Après ces paroles, ils le virent s'élever et disparaître à leurs yeux dans une nuée.
Et comme ils fixaient encore le ciel où Jésus s'en allait, voici que deux hommes en vêtements blancs se tenaient devant eux et disaient :
« Galiléens, pourquoi restez-vous là à regarder vers le ciel ? Jésus, qui a été enlevé du milieu de vous, reviendra de la même manière que vous l'avez vu s'en aller vers le ciel. »


Psaume 47(46),2-3.6-7.8-9.

Tous les peuples, battez des mains,
acclamez Dieu par vos cris de joie !
Car le Seigneur est le Très-Haut, le redoutable,
le grand roi sur toute la terre,

Dieu s'élève parmi les ovations,
le Seigneur, aux éclats du cor.
Sonnez pour notre Dieu, sonnez,
sonnez pour notre roi, sonnez !

Car Dieu est le roi de la terre :
que vos musiques l'annoncent !
Il règne, Dieu, sur les païens,
Dieu est assis sur son trône sacré.


Lettre aux Hébreux 9,24-28.10,19-23.

Le Christ n’est pas entré dans un sanctuaire construit par les hommes, qui ne peut être qu’une copie du sanctuaire véritable ; il est entré dans le ciel même, afin de se tenir maintenant pour nous devant la face de Dieu.
Il n'a pas à recommencer plusieurs fois son sacrifice, comme le grand prêtre qui, tous les ans, entrait dans le sanctuaire en offrant un sang qui n'était pas le sien ;
car alors, le Christ aurait dû plusieurs fois souffrir la Passion depuis le commencement du monde. Mais c'est une fois pour toutes, au temps de l'accomplissement, qu'il s'est manifesté pour détruire le péché par son sacrifice.
Et, comme le sort des hommes est de mourir une seule fois, puis de comparaître pour le jugement,
ainsi le Christ, après s'être offert une seule fois pour enlever les péchés de la multitude, apparaîtra une seconde fois, non plus à cause du péché, mais pour le salut de ceux qui l'attendent.
Frères, c'est avec pleine assurance que nous pouvons entrer au sanctuaire du ciel grâce au sang de Jésus :
nous avons là une voie nouvelle et vivante qu'il a inaugurée en pénétrant au-delà du rideau du Sanctuaire, c'est-à-dire de sa condition humaine.
Et nous avons le grand prêtre par excellence, celui qui est établi sur la maison de Dieu.
Avançons-nous donc vers Dieu avec un cœur sincère, et dans la certitude que donne la foi, le cœur purifié de ce qui souille notre conscience, le corps lavé par une eau pure.
Continuons sans fléchir d'affirmer notre espérance, car il est fidèle, celui qui a promis.


Évangile de Jésus Christ selon saint Luc 24,46-53.

Jésus ressuscité, apparaissant à ses disciples, leur disait : « Il fallait que s'accomplisse ce qui était annoncé par l'Écriture ; les souffrances du Messie, sa résurrection d'entre les morts le troisième jour,
et la conversion proclamée en son nom pour le pardon des péchés à toutes les nations, en commençant par Jérusalem.
C'est vous qui en êtes les témoins.
Et moi, je vais envoyer sur vous ce que mon Père a promis. Quant à vous, demeurez dans la ville jusqu'à ce que vous soyez revêtus d'une force venue d'en haut. »
Puis il les emmena jusque vers Béthanie et, levant les mains, il les bénit.
Tandis qu'il les bénissait, il se sépara d'eux et fut emporté au ciel.
Ils se prosternèrent devant lui, puis ils retournèrent à Jérusalem, remplis de joie.
Et ils étaient sans cesse dans le Temple à bénir Dieu.

Rédigé par Paroisse saint Jean Baptiste

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